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Gamou Taïba Niassène: La vie et l’œuvre de Cheikh Al Islam Baye Niass
Baye Niass (Taïba Niassène, 1900 – Londres, 1975), de son vrai nom Ibrahima Niass (forme longue) Cheikh Al Islam Mawlana Ibrahima Niass, est un soufi, gnostique et mystique musulman, sénégalais. Il est le 9e fils d`Abdoulaye Niass.
Il fut le fondateur du mouvement Fayda Tijanya, une branche de la confrérie soufis, la Tijanya, qui deviendra l`une des plus importantes organisations musulmanes au monde comptant plus d`une centaine de millions d`adeptes selon Christopher Gray (The rise of the Niassene tijaniyya, 1875 to the présent. Edition Islam et Société).
La position stratégique de Kaolack (Centre du Sénégal) et les relations suivies de son père avec les lettrés du Sénégal, de la Mauritanie et l`Afrique du nord font de sa maison paternelle un endroit privilégié où le jeune Ibrahim étudie non seulement les science religieuses (exégèse, jurisprudence, théologie, grammaire arabe, rhétorique, métrique, biographie du Prophète (SAS), etc.) mais également cultive un goût prononcé pour le mysticisme musulman. Témoigne de ses connaissances ésotériques d`acquisition précoce, son premier ouvrage rûh al adab écrit à l`âge de 18 ans (En fait l`auteur Ibrahima Niass dit à la fin de son ouvrage qu`il avait 21 ans quand il écrivit son œuvre, Note du présentateur) , ainsi que son fameux kâshif al ilbas (1930) [Traité fondamental de Soufisme et de la Voie Tijaniyya, Note du présentateur].
À la mort de son père, en 1922, son frère aîné Mouhammad (Khalifa) prend en charge la communauté des « Niassènes » et Ibrahima enseigne dans les écoles coraniques de son père de Taïba, Kossi et Kaolack. Son érudition et sa piété lui attirent très vite de nombreux adeptes. Dès 1930, il se proclame héritier spirituel de Ahmed Tijan, et obtient l`allégeance massive des disciples de son père ainsi que celle de nombreux cheikhs maures qu`il initie à la tarbiyya (initiation mystique) dont le but est de parvenir à la marifa(gnose) .Initiation qui marque la spécificité de sa branche Tijaniyya.
Toutefois son audience reste limitée jusqu`en 1937, année où il effectue son premier pélérinage à la Mecque et y rencontre l`Emir de Kano(Nord du Nigeria), Abdoulahi Bayero qui renouvelle son affiliation à la Tijaniyya auprès de lui et l`invite à Kano. Il y obtient l`adhésion de la majorité des oulémas de la Tijaniyya qui, dès la fin de deuxième guerre mondiale, se font les moteurs de l`expansion de son mouvement dans toute l`Afrique de l`Ouest. À la mort de l`Emir Abdoulahi Bayero en 1953, son fils Mouhamed Sanuss lui succède et renforce ses liens avec Ibrahima Niasse. À la fin des années 1960, grâce à ses appuis politiques, le zèle de ses disciples nord-nigérians, son action éducative, le zèle de son prosélytisme, il se trouve à la tête d`une communauté transnationale de plusieurs millions de membres répartis entre le Nord Nigéria, lieu par excellence de son rayonnement, le Ghana, le Niger, le Togo, le Libéria, la Sierra Leone, le Tchad, le Cameroun, la Gambie, la Mauritanie et la région du Sine saloum. Selon Mervyn Hiskett (Development of Islam in West Africa, p.287) « by the end of colonial period, there is little doubt that it was by then the largest single Muslim organisation in West Africa. » (Il n`y a aucun doute que son mouvement était la plus grande organisation musulmane en Afrique de l`Ouest à la fin de la période coloniale).
Au delà de l`Afrique, de nos jours, on retrouve ce mouvement aux USA, en Asie mais aussi dans les pays du Golf.
Premier chef religieux ouest africain à établir des contacts avec les organisations islamiques internationales, Ibrahim Niasse a été membre fondateur et vice-président de la ligue Mondiale Islamique basée à la Mecque, membre de l`Académie de Recherches de l`Université d`Al-Azhar et vice-président de la Conférence Mondiale Islamique dont le siège est à Karachi.
Plus qu`un érudit et un chef charismatique, Ibrahima Niasse était un homme politique d`envergure. Non seulement, il entretenait des relations étroites avec des dirigeants africains et arabes dont l`ancien président égyptien Nasser et le premier président du Ghana Kwamé Nkrumah qui, bien que chrétien, passe pour avoir été un de ses disciples. Il a été dans les années 1950 et 1960, très actif dans l`arène politique africaine en général et nigériane en particulier ou il dispose plusieurs dizaines de millions de disciples.
QUELQUES QUALITÉS DE CHEIKH IBRAHIM NIASS
Le Cheikh possédait de très belles et nobles qualités, toutes marquées du sceau de la complétude lesquelles suscitaient l’attirance de tous ceux qui le connurent. Il entretenait des relations avec des personnes de nationalités diverses. Il ne proférait que les meilleures paroles et était d’une grande générosité. Il était véridique et son cœur pur était rempli de crainte pieuse. Il était magnanime et disait » j’ai un regard pour le fils d’Adam par lequel il m’est impossible de le détester>. Il était toujours occupé et ne connu jamais de moments de répit. Il n’était pas prisonnier du repos et du prélassèrent. Il dit un jour a un de ses fils : »Tu ne dois accorder aucun crédit au mot repos dans ce monde, car il n’y en point>. Il était tour a tour l’Imam qui lisait les prônes et dirigeait les prières, le professeur émérite, le juge droit et juste, le prêcheur vivifiant, l’éducateur et l’élévateur aux hautes stations spirituelles, l’invoquant par le sir, l’exégète et le savant au savoir pur et sublime. Il était un lecteur assidu du Coran qu’il clôturait bi hebdomadairement: il lisait et récitait hebdomadairement le Saint Livre.
Il était très préoccupé par la communauté de Muhammad (SAW) et disait : » Mon dessein est de la conduire a la présence du Bon Très Miséricordieux qu’est Allah>. Ils n’adoreront ainsi plus personne sinon Allah. Il tenait en estime ses disciples et les couvrit de bienfaits qui les lièrent a sa personne au point qu’un noble savant mauritanien Al Ukhta Olid Muhamed Baba écrivit ses vers : » Je suis l’esclave du Cheikh Ibrahim. S’il veut il me vend, s’il veut il m’anobli. Il m’a asservi par les honneurs, car l’honneur possède le noble.> Il plaçait une solide confiance en Dieu et le priait en toute pitié malgré la faveur qui lui était accordé. Il disait : » Allah m’a donné le savoir et le pouvoir d’agir sur les choses. Si j’ordonne en disant mon injonction sera suivi sans tarder d’effet. Mais j’ai pris Allah pour garant. Je ne suis pas et c’est par l’ordre divin que j’agis. Cela par politesse et bonne conduite. Pour cela il m’a choisi (pour être son) ami.>Beaucoup de gens ont agit autrement âpres avoir bénéficié du secret! Il était doux, indulgent, patient et ne nourrissait aucune animosité pour ses ennemis.